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La veille environnementale: COP 21

La veille environnementale à l’heure de COP21

03 Déc 2015, Posté par T. Perran dans A la une, Regard sur l'actualité

Gouverner, c’est prévoir. Cet adage peut aussi s’appliquer au monde de l’entreprise, et tout particulièrement en matière d’investissement dans l’innovation. Ces jours-ci, Paris est devenu le centre du monde où l’avenir climatique de la planète va se décider au sein de la conférence internationale COP21. Les entreprises, qui arriveront à mieux appréhender voire anticiper les conséquences des décisions politiques, seront celles qui verront le plus clairement où seront flécher les budgets publics et sauront le mieux en profiter pour développer à moindre frais leurs produits et services. Tels sont les fruits que peuvent apporter la veille environnementale à l’heure de COP21 !

Qu’est-ce que la COP21 ?

La COP21 qui se tient du 30 novembre au 11 décembre au Bourget est une réunion hors norme sur un enjeu colossal : plus de 150 chefs d’Etat et de gouvernement réunis pour la 21ème conférence climatique de l’ONU, censée accoucher d’un accord historique contre un réchauffement planétaire aux conséquences de plus en plus inquiétantes.

L’objectif est ici d’élaborer le premier accord engageant l’ensemble de la communauté internationale à réduire ses émissions de gaz à effet de serre, afin de limiter le réchauffement global à + 2 °C par rapport à l’ère pré-industrielle. En vue de la conférence de Paris, 183 pays (sur 195) ont publié des plans de réduction de leurs émissions, une participation inespérée qui place cependant encore le monde sur une trajectoire de + 3°C.

Alors que les concentrations de gaz à effet de serre ont atteint un nouveau record en 2014, les négociations s’annoncent ardues. Tous les pays ont leurs « lignes rouges » qu’ils ne voudront pas franchir, les pays du Sud par exemple appelant le Nord, responsable historique du réchauffement, à honorer ses promesses financières.

Qu’est-ce que la veille environnementale ?

La veille environnementale peut se résumer à l’activité de veille et d’intelligence économique, relative aux informations liées à la sauvegarde de l’environnement. Pour les entreprises s’intéressant à ce sujet, cela revient donc à chercher, à collecter et à analyser les informations sur trois niveaux principalement :
• L’évolution des normes environnementales dans le monde (veille règlementaire)
• Les évènements majeurs et les signaux faibles pouvant influencer ses normes (lobbying)
• L’avènement des nouvelles technologies ayant un impact sur l’environnement (veille technologique)

Ainsi, en toute rigueur, la veille environnementale couvre un domaine extrêmement vaste qu’il est presque impossible de suivre continuellement, ce qui est particulièrement le cas pour la veille réglementaire. En revanche, une mise en surveillance des évènements majeurs ayant un impact sur l’environnement et le lieu où ces évènements se produisent peuvent permettre d’anticiper le comportement des Etats et les conséquences que cela va avoir sur les industries locales.

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La vitesse de fonte des glaces double tous les dix ans actuellement

Les émissions de gaz à effet de serre (dioxyde de carbone, protoxyde d’azote, méthane…) contribuent au réchauffement de la planète et proviennent principalement des activités industrielles, agricoles, de traitement des déchets, du transport et de la production énergétique. Ces émissions ont augmenté rapidement depuis la révolution industrielle et au cours du 20ème et du 21ème siècle. Cette année, et pour la première fois, il est prévu que la température globale de la planète soit d’un degré de plus que lors de la période préindustrielle (avant 1850). Le mois d’octobre 2015 était le mois le plus chaud jamais enregistré.

Les conséquences de ce réchauffement sont nombreuses :
• Hausse du niveau de la mer (déjà de 20 cm depuis 1900), notamment à cause de la dilatation thermique des océans et de la fonte des glaciers qui s’accélère (doublement de la vitesse de fonte tous les 10 ans).
• Prévision d’une hausse de l’intensité et de la fréquence des événements météorologiques extrêmes (sécheresse, tempêtes et inondations).
Il est notable que la dégradation de l’environnement provoque déjà le déplacement de plus de 26 millions de personnes en moyenne par an depuis presque une décennie. On parle de réfugiés climatiques.
• Perturbation des écosystèmes et dégradation de la biodiversité.
Le changement climatique contribue à la dégradation de la biodiversité, et vice-versa. Préserver la biodiversité et lutter contre le dérèglement climatique vont également de pair. Par exemple, la biodiversité fournit des puits de carbone naturels (les forêts, le plancton…). Selon l’Evaluation des écosystèmes du millénaire (Millenium Ecosystem Assessment) de 2005, 60% des écosystèmes sont exploités de manière insoutenable ou sont dégradés.
A cela s’ajoute les conséquences économiques avec une perte importante du PIB mondial.

Le changement climatique est considéré par les Nations unies, la Banque Mondiale, le FMI et d’autres institutions internationales comme l’une des plus grandes menaces pour l’humanité du XXIe siècle.

Cependant, il est important de percevoir la lutte contre le dérèglement climatique aussi comme une opportunité de bâtir une économie plus résiliente et pour améliorer notre façon de vivre ensemble.

Quel rôle pour la veille environnementale ?

Avec la grande variété d’énergies disponibles, il est grand temps de flécher les investissements publics et de choisir quelles énergies l’on souhaite soutenir. A l’heure actuelle, l’industrie des carburants fossiles bénéficie mondialement de 5300 milliards de dollar de subventions par an, soit 6,5% du PIB mondial alors même que ces carburants fossiles sont en premier lieu responsables des émissions de CO2. Depuis l’année 2000, c’est le charbon qui a engendré la plus forte hausse des émissions, et de très loin. Les émissions de CO2 dues aux activités humaines sont en augmentation rapide et sont de l’ordre de 40 Gt/an dont 34 Gt/an (85%) proviennent des carburant fossiles (charbon, pétrole et gaz).

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Emission de CO2 dans le monde par type d’énergie ou d’activité (Source : Jean-Marc Jancovici, 2013)

La veille environnementale peut être utilisée judicieusement pour identifier les acteurs importants et les lieux où il faut être dans ce monde qui est en train de changer de paradigme dans sa façon de traiter la nature. La veille environnementale peut permettre de faire parti de ceux qui vont accompagner les innovations marquantes et assurer la transition entre un projet de R&D et la production à grande échelle. Le monde de la finance suit le mouvement avec des fonds verts dits « green bonds » accessibles en bourse.

Comme l’a montré la toute première journée de COP21, le développement de l’innovation dans le domaine des énergies propres passe par l’alliance du secteur privé et de la puissance publique. Une alliance au plus haut niveau, puisque se sont retrouvés à la tribune, pour le lancement de la « mission innovation », les présidents français et américain, François Hollande et Barack Obama, le premier ministre indien, Narendra Modi, ainsi que Bill Gates, ex-PDG de Microsoft. Cela, devant un parterre d’une vingtaine de chefs d’Etat et de gouvernement, dont le Japonais Shinzo Abe, la Brésilienne Dilma Rousseff, la Chilienne Michelle Bachelet, ou encore l’Indonésien Joko Widodo et le Britannique David Cameron. L’idée de ce « partenariat » est d’augmenter substantiellement les investissements publics et privés pour développer les énergies propres, en leur donnant les moyens de jouer leur rôle dans la lutte contre le réchauffement climatique.

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Bill Gates et Barack Obama, au Bourget, pendant la COP21, lundi 30  novembre

Les technologies vertes, telles que celles des énergies renouvelables, des économies d’énergie, du bio-mimétisme et du génie écologique (ces deux dernières filières visant à préserver la biodiversité et les écosystèmes) sont des formidables leviers de création d’emplois.

L’économie circulaire, consistant à réduire notre production de déchets, de recycler et de revaloriser nos déchets, est le modèle économique de demain et favorise davantage l’activité locale, l’économie sociale et solidaire et le lien social.

Pour finir, une société bas carbone et écologique nécessite des transitions dans tous les secteurs et permettra une meilleure santé des citoyens.

Avec l’aide de la veille environnementale, les entreprises permettront à tous d’accéder plus rapidement à cet objectif. Ci-dessous, un exemple d’innovation en rupture découverte par deux chercheurs indiens à l’Université d’Oxford au sujet d’une technologie d’affichage faisant appel à des matériaux de changement de phase, qui consomme 10 fois moins d’énergie que celles présentes dans les écrans de smartphones et les télévisions LED. Vu le nombre de smartphones et de TV LED dans le monde, les économies d’énergie seraient énormes au même titre que le marché pour cette découverte, identifiée par la veille environnementale !

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Des chercheurs indiens à Oxford ont trouvé une innovante technologie d’affichage à base de matériau à changement de phase, pouvant décupler la durée d’utilisation des smartphones avant recharge